Suivez nous sur nos autres médias :
SNPM Syndicat National des policiers Municipaux

Colis refusé à une femme voilée : la buraliste d’Albi placée sous contrôle judiciaire

Posted On 20 Avr 2018
By :
Comment: Off
La jeune femme porte un Jilbeb depuis un an./ Photo DDM, illustration
La jeune femme porte un Jilbeb depuis un an./ Photo DDM, illustration

La buraliste d’Albi qui avait refusé de délivrer un colis au motif qu’une cliente ne voulait pas retirer son voile a été placée en garde à vue et convoquée directement ce vendredi après-midi par le procureur de la République. La commerçante, Marie P., est poursuivie pour « discrimination en raison de la religion, refus d’un bien ou d’un service dans un lieu accueillant du public ou pour en interdire l’accès ». Après présentation au juge, la commerçante a été placée sous contrôle judiciaire avec interdiction de sortie du territoire national en attendant son procès.

Marie P. devra répondre le 24 mai à 14 heures, devant le tribunal correctionnel d’Albi, de quatre plaintes pour les mêmes motifs de « discrimination religieuse », confirme le procureur Alain Berthomieu. Selon les éléments de l’enquête confiée à la police, les différentes plaignantes portaient bien des voiles qui ne dissimulaient pas leurs visages. « Il ne s’agit pas d’un voile intégral » confirme le procureur.

« Je souhaite que la justice soit rendue. Ce jour-là, je me suis sentie humiliée. »

Anaïs R., une Albigeoise de 29 ans installée dans le quartier Saint-Martin depuis décembre, avait porté plainte contre cette buraliste du rond-point de Gesse pour «discrimination religieuse ». Les faits se sont produits vendredi dernier. La jeune femme convertie à l’islam « depuis plusieurs années » porte un Jilbeb depuis un an. Il s’agit d’une longue robe et d’une capuche qui couvrent son corps et les cheveux, mais laisse apparaître le visage, les mains et les pieds.

Vendredi dernier, la buraliste, Marie P. avait donc refusé de lui délivrer un colis au motif que cette cliente ne voulait pas retirer son voile. Anaïs qui est Française et native de l’Aude, a repris des études à l’université Paul-Sabatier de Toulouse en 1re année de DUT GEA. Jointe par La Dépêche du Midi ce matin, cette Albigeoise s’explique.

Qu’attendez-vous de la plainte que vous avez déposé ?

Je souhaite que la justice soit rendue. Je me fiche des dommages et intérêts. Ce jour-là, je me suis sentie humiliée. Quand j’ai posté mon message sur Facebook, je pensais sincèrement être la première à avoir vécu cela dans ce magasin. Depuis, j’ai reçu d’autres témoignages de femmes qui ont eu le même problème là-bas. J’ai appris qu’il y avait eu d’autres plaintes.

Est-il exact que vous êtiez prête à retirer votre voile dans un coin du magasin à l’abri des regards ?

Je suis nouvelle à Albi. Je ne voulais pas entrer en conflit, j’étais prête à faire un pas. J’ai proposé à la commerçante de retirer mon voile dans un coin du magasin même si j’étais dans mon bon droit et que rien ne m’y obligeait. Elle voulait que je me dévoile devant tout le monde, ce que j’ai refusé.

Finalement, vous avez quand même obtenu votre colis.

Un monsieur qui a pris ma défense devant les autres clients, a signé pour moi et m’a donné le colis. La buraliste a pris ma carte d’identité et la sienne mais n’a même pas noté le nom du monsieur… C’est très curieux alors que la dame dit agir par mesure de sécurité.

Avez-vous déjà eu ce genre de problème à Albi ?

Jamais aucun problème. J’ai fait faire un passeport, je suis allée à la mairie. On ne m’a jamais rien demandé. À la fac, il n’y a aucun problème. On m’a fait une carte étudiante sans difficulté. Je me sens très bien dans cette ville, même si depuis vendredi, j’ai l’impression qu’on me regarde de travers. J’en ai pleuré tout le week-end. Mon fils de trois ans m’a demandé ce que j’avais.

Retournerez-vous dans ce magasin ?

Si j’avais su, je n’aurais jamais mis mon point relais là-bas. Je n’ai pas l’intention d’y retourner, je ne suis pas une provocatrice. Chacun a le droit d’avoir ses opinions. Mais il y a des lois à respecter.

Anaïs n’a pas souhaité se faire photographier pour  «se protéger».


La commerçante: « J’ai toujours respecté la loi »

Marie P. la buraliste du rond-point de Gesse s’est contenté d’un court commentaire mercredi lorsque La Dépêche du Midi l’a contactée. La gérante qui se dit « choquée » est convoquée le 24 mai prochain devant le tribunal correctionnel d’Albi pour répondre de trois plaintes pour « discrimination religieuse ». La buraliste précise « avoir toujours respecté la loi » et ne « jamais faire de discrimination ».

Et de préciser : « Je demande systématiquement aux personnes qui portent une capuche, un casque ou une casquette avec visière longue de les retirer. C’est pour les reconnaître par rapport à leur carte d’identité. »

Elle sera défendue lors de l’audience par Me Simon Cohen du barreau de Toulouse.

A propos de l'Auteur