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L’imam de Toulouse s’explique après ses propos controversés sur les juifs

Posted On 06 Juil 2018
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L'imam d'Empalot Mohamed Tataï présente ses excuses./ Photo DDM, Ludovic Lai-Yu
L’imam d’Empalot Mohamed Tataï présente ses excuses./ Photo DDM, Ludovic Lai-Yu

Après la polémique suscitée par des propos controversés sur les juifs lors d’un prêche de 2017, Mohamed Tataï, l’imam de la mosquée d’Empalot, s’explique dans un entretien accordé à La Dépêche du Midi.

La polémique est née au lendemain de l’inauguration, le 23 juin dernier, de la grande mosquée d’Empalot, la première de Toulouse. Le site Memri, relayé par des blogs identitaires, a diffusé une vidéo montrant l’imam d’Empalot, Mohamed Tataï, se livrant à un prêche virulent, datant de 2017 dans la salle de prières qui servait de mosquée provisoire, dans lequel il appelait à «battre les juifs». Le film, publié sur le compte YouTube de la mosquée, est de mauvaise qualité et fait l’objet d’un montage. L’imam s’y exprime en arabe, ses propos sont sous-titrés en anglais.

« Des propos sortis de leur contexte »

Mohamed Tataï dénonce un montage grossier et des propos, prononcés dans le cadre du commentaire d’un « hadit » (propos rapportés du prophète), « sortis de leur contexte et détournés de leur sens ». « C’est une trahison de mes propos, explique-t-il à La Dépêche du Midi. Et si ceux qui ont diffusé ces extraits n’ont pas le courage de s’excuser, moi je présente mes excuses à tous ceux qui ont pu se sentir offensés, notamment nos amis de confession juive. » S’il affirme avoir « reçu des menaces », il dit par ailleurs qu’il « n’oubliera jamais la réaction sage des représentants de la communauté juive locale ».

L’imam précise que son prêche faisait référence à un texte religieux sur la fin des temps, que provoquerait une guerre entre juifs et musulmans « et qu’il fallait tout faire pour ne pas en arriver là ».

Enquête ouverte

A la suite de la diffusion des extraits controversés sur les réseaux sociaux, le Parquet de Toulouse a été saisi par le préfet de la Haute-Garonne pour des faits susceptibles de constituer «une incitation à la haine». Le SRPJ de Toulouse a été chargé de l’enquête. Les propos rapportés par la vidéo ont fait l’objet d’analyses par les services du ministère de l’Intérieur et selon des sources proches du dossier, le caractère antisémite des propos ne ferait aucun doute.

Plusieurs organisations comme l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) ou la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), ont déposé plainte pour incitation à la haine. Le maire de Toulouse, Jeann-Luc Moudenc, a également interpellé le préfet de Haute-Garonne, Pascal Mailhos.

Visite prochaine de Dalil Boubakeur

Dans une lettre adressée au maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, ce 4 juillet, le recteur de la grande mosquée de Paris (GMP), Dalil Boubakeur, « condamne et regrette vivement les propos totalement incongrus de cet imam qui cite un texte (hadith) de Abou Hourayra un traditionniste musulman du 7e siècle dans un prêche ». Il ajoute que « cet imam se doit d’organiser une rencontre d’excuses et d’explications avec les Toulousains ».

Dalil Boubakeur, qui devrait se rendre prochainement à Toulouse, tient dans cette lettre des propos beaucoup plus vifs que ceux exprimés lundi 2 juillet où il nuancait la portée des propos de Mohamed Tataï. Ce jour-là, pour Dalid Boubakeur, l’imam toulousain «a toujours appelé dans ses prêches au respect de toutes les communautés religieuses, et en particulier de la communauté juive qu’il évoque constamment en termes favorables  et avec qui il entretient d’excellents rapports». Dalil Boubakeur a reçu Mohamed Tataï en présence du conseil théologique de la GMP. «En raison de son engagement exemplaire à Toulouse et dans la région en faveur du vivre-ensemble, la Mosquée de Paris souhaite que l’imam Tataï poursuive sa mission dans la paix, le dialogue et la sérénité», ajoute l’institution parisienne. La GMP est le siège d’une fédération nationale (FGMP) liée à l’Algérie dont est proche l’association gérant la grande mosquée de Toulouse fraîchement inaugurée, où prêche l’imam Tataï.


Le Crif ne veut plus continuer à dialoguer « avec quelqu’un qui souhaite la mort » des juifs

Président du conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Midi-Pyrénées, Franck Touboul, qui avait assisté le 23 juin à l’inauguration de la mosquée aux côtés de Mohamed Tataï, a condamné ce mercredi les propos de l’imam : « La confusion du fanatisme religieux et du politique est ce que pratique Mr Tatai qu’il s’agisse, pour se référer à deux exemples avérés, d’appels à la disparition des Juifs ou des théories complotistes autour du 11 septembre. Le Crif a souhaité attendre, dans une attitude républicaine, la traduction des services de police. Cependant, les propos n’étant pas niés dans le communiqué de la Grande Mosquée de Paris, nous pouvons les considérer que comme tenus. Ces propos ne sont pas, comme semble vouloir le dire la Grande Mosquée de Paris, une « eschatologie des fins dernières et à la souffrance du peuple juif ». Ils sont une eschatologie des fins dernières qui justifie de tuer des Juifs au nom de l’Islam. Comment oser parler ensuite d’excuses auprès de la communauté juive et d’interprétation « décontextualisée » ? Ces propos ne souffrent d’aucune ambiguïté.  A Toulouse, nous savons, hélas, que des appels aux meurtres ont déjà été entendus et appliqués. Nous ne resterons donc pas sans réaction face à de tels discours. C’est en contradiction absolue avec les principes républicains.  Nous voulons croire que l’Etat prendra les mesures qui s’imposent face à la gravité de ces faits. Pour ce qui nous concerne, nous ne pouvons nous satisfaire d’une simple condamnation de ces propos. La Grande Mosquée de Paris encourage monsieur Tatai à poursuivre sa mission. Comment penser que nous puissions continuer à dialoguer avec quelqu’un qui souhaite notre mort ? (…)  Nous connaissons la nécessité du dialogue interreligieux, mais il n’est possible qu’avec des interlocuteurs honnêtes, sincères et francs ».

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