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Le recrutement, un enjeu majeur pour les forces de sécurité intérieure

A recrutement massif, campagne de communication inédite. La Police nationale vient de lancer ce mardi 15 mai une très importante campagne de communication destinée à booster son recrutement en 2018. Une opération de publicité, dotée d’un budget d’un million d’euros, déclinée sur les réseaux sociaux et surtout à la télévision. Du jamais-vu depuis l’année 2000. “C’est bien que la Police nationale commence à faire de la communication, comme la Gendarmerie en fait depuis longtemps”, se réjouit Jean-Marc Bailleul, le secrétaire général du syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI-CFDT), interrogé par L’Essor.

Cette coûteuse campagne médiatique doit permettre d’attirer davantage de candidats vers les concours de la police, en montrant des métiers “qui ne se limitent pas à ceux de la voie publique”, souligne à L’Essor Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Cesdip. En insistant sur les fonctions d’assistance ou de protection des personnes, au-delà de la répression, la campagne véhicule également “une image positive” de cette institution, qui fait ainsi coup double.

Eric Morvan – DGPN@DGPNEricMorvan

Nouveaux défis, nouvelles menaces, nouvelles techniques…
La @PoliceNationale a besoin de tous les talents : sportifs, juristes, scientifiques, geeks ou linguistes : nous recrutons des jeunes de tous horizons et de tous niveaux.

Cette diversité, c’est la richesse de la police.

La direction de la police nationale met le paquet car les besoins sont importants. En 2018, elle espère recruter près de 8.000 personnes, dont 3.300 gardiens de la paix, 2.000 adjoints de sécurité, 1.500 personnels administratifs, techniques et scientifiques, 650 cadets, 70 officiers et 56 commissaires de police. “Ces recrutements permettront d’atteindre l’objectif de création de postes annoncé pour 2018 et de compenser les départs naturels de l’année”, précise le ministère de l’Intérieur.

10.000 policiers et gendarmes de plus

Illustration (SD/L’Essor).

Emmanuel Macron, lors de la campagne électorale pour l’élection présidentielle, avait en effet annoncé le recrutement à venir de 7.500 policiers et de 2.500 gendarmes durant les cinq ans du quinquennat. Une clé de répartition qui n’est pas reprise dans les éléments de communication de la Place Beauvau. Et pour cause, elle fait grincer des dents chez les gendarmes, qui s’estiment moins bien traités que les policiers du côté des embauches.

Près d’un an après l’élection d’Emmanuel Macron, ces recrutements sont menés tambour battant. Car sur ces 10.000 emplois supplémentaires, 7.000 d’entre eux doivent être alloués d’ici 2020. “Un chiffre illustre l’ampleur de l’effort accompli : alors qu’en 2012, 488 élèves gardiens de la paix seulement étaient incorporés dans les écoles de police, nous en accueillerons plus de 4.500 l’an prochain”, expliquait ainsi le président de la République en octobre 2017 devant les forces de sécurité intérieure.

Lire aussi sur L’Essor : Ce qui attend les gendarmes en 2018 (actualisé)

Moins bien lotie en termes d’effectifs dans le programme d’Emmanuel Macron, la Gendarmerie ne va pas pour autant chômer sur le plan du recrutement. Elle devrait embaucher cette année environ 4.000 sous-officiers et 7.000 gendarmes adjoints volontaires. L’arme fait en effet face aux départs des gendarmes de la “Génération Mitterrand”, un pic générationnel de recrutement au début des années 1980.

L’an passé, le commandement tablait sur le recrutement dans les cinq à venir de 50.000 nouveaux gendarmes, ce qui devrait se traduire par l’augmentation du nombre de compagnies en formation chaque année, de 48 à 51 ou 52 dans les deux années à venir. Un nombre qui pourrait encore grossir en cas d’une éventuelle réforme du système de retraite des gendarmes. Hervé Renaud, le directeur des personnels militaires de la Gendarmerie, avait ainsi alerté les sénateurs de ce risque. Un départ anticipé de nombreux sous-officiers dans ce cas de figure alourdirait alors dangereusement la charge des écoles.

Lire aussi sur L’Essor : Retraites: le DRH de la Gendarmerie tire la sonnette d’alarme

Le piège du recrutement à tout va

Le maréchal des logis chef Thierry Guerrero de gendarmes et citoyens ( Photo DR)

L’important effort de recrutement pose désormais un nouveau problème à des administrations habituées durant la dernière décennies à un nombre faible d’embauches. La Gendarmerie est attractive, mais avec cet important renouvellement des effectifs, il ne faudra pas tomber dans le piège d’un recrutement à tout va, met en garde Thierry Guerrero, le président de l’association professionnelle nationale de militaires Gendarmes et citoyens, interrogé par L’Essor. Nous espérons que la direction générale sera vigilante sur la qualité des recrutements à venir.”

L’interrogation est la même dans la Police nationale. “C’est important de recruter, mais il y a un risque de faire du quantitatif et non du qualitatif“, s’inquiète Jean-Marc Bailleul. L’an passé, environ 400 postes sont restés non pourvus dans la police à l’issue des concours, faute de candidats ayant le niveau requis.

Avec les hausses d’effectifs, les filières de la sécurité et de la défense, que ce soit la Police, la Gendarmerie, les Armées, l’administration pénitentiaire ou même la sécurité privée se retrouvent aujourd’hui en concurrence pour embaucher des profils similaires. Une saine émulation qui peut aussi devenir “contre-productive car nous sommes sur le même terreau de candidats”, craint Jean-Marc Bailleul.

De nombreux jeunes diplômes attirés par les métiers de la sécurité s’inscrivent ainsi aux différents concours, pour ensuite intégrer la première institution où ils sont admis, relève en effet Mathieu Zagrodzki. Mais pour ce chercheur, la concurrence entre forces de sécurité intérieure est relativement limitée. A l’exception peut-être des… polices municipales. Ces dernières pourraient bien tirer leur épingle du jeu. La promesse d’un lieu de travail fixe et un équipement plus moderne qu’auparavant peuvent désormais attirer des profils qui auraient autrefois postulé dans une force nationale.

Gabriel Thierry

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