Suivez nous sur nos autres médias :
SNPM Syndicat National des policiers Municipaux

SECURITE LOCALE : Entretien avec Thierry Coudert sur les grands chantiers de l’intérieur

Publié le • Mis à jour le • Par Hervé Jouanneau • dans : A la une, A la Une prévention-sécurité, Actu experts prévention sécurité, France

 

Thierry-CoudertDans un entretien accordé au Club prévention sécurité DE la Gazette, le préfet Thierry Coudert, nommé en juin 2014 délégué aux coopérations de sécurité au ministère de l’Intérieur, fait le point sur l’avenir des polices municipales, la réforme de la sécurité privée et DRESSE un état des lieux de la vidéoprotection en France.

 

Le nom de Thierry Coudert n’est pas inconnu des policiers municipaux. En tant que directeur de cabinet de Brice Hortefeux, alors ministre des COLLECTIVITÉS territoriales, il fut en 2006 l’un des artisans du protocole d’accord sur la professionnalisation des policiers municipaux.
Après avoir poursuivi une carrière de haut-fonctionnaire et s’être INVESTI en politique, ce préfet de 56 ans a été nommé en juin dernier délégué aux coopérations de sécurité. A ce titre, il est chargé du dialogue avec les polices municipales, le monde de la sécurité privée et celui de la vidéoprotection. L’occasion de passer en revue les grands chantiers qui attendent les acteurs de la sécurité locale.
Les policiers municipaux ont connu un nouveau drame au début du mois de novembre avec la mort d’un agent à Vénissieux lors d’une course-poursuite. Suite à cet événement dramatique, la question de la dangerosité du métier de policier municipal a de nouveau été posée. Quelle est votre réaction ?
Après CELLE d’Aurélie Fouquet le 20 mai 2010 à Villiers-sur-Marne, la disparition brutale de Yacine Zobiri, tout juste 30 ans, alors qu’il poursuivait un véhicule volé à Vénissieux, nous rappelle que le métier de policier municipal reste soumis aux dangers de la criminalité violente. Car, le rôle des polices municipales est notamment de mener une action de prévention et de dissuasion de TERRAIN, aux côtés des forces de police et de gendarmerie nationales. Elles peuvent même se retrouver parfois, comme c’était le cas ici, en première ligne.
A l’instar des policiers et des gendarmes, elles sont donc confrontées à ce que notre SOCIÉTÉ a de plus violent ; confrontées également à la part de détresse – parfois de désespoir – qu’elle peut porter en elle.
Dans un contexte certes différent, ces deux décès en service forcent notre respect. Ils doivent également continuer de nous faire réfléchir SUR LES évolutions à entreprendre pour permettre aux policiers municipaux de remplir leurs missions dans les meilleures conditions de sécurité possible.
Les policiers municipaux sont nombreux à attendre le vote de la proposition de loi sur les polices territoriales, déjà adoptée en juin dernier au Sénat. Ce texte sera-t-il bientôt examiné à l’Assemblée nationale ?
La proposition de loi portée par les sénateurs René Vandierendonck et François Pillet a été déposée SUR LE bureau de l’Assemblée nationale. Nous sommes maintenant en attente de son inscription à l’agenda. Le gouvernement déposera les mêmes amendements que devant le Sénat.
L’une des priorités fixées par les gouvernements successifs est de renforcer la coopération entre les polices municipales et les forces de sécurité régaliennes. Pour ce faire, les policiers municipaux demandent un accès direct aux fichiers de police, sans forcément passer par un officier de policier judiciaire. Cette revendication va-t-elle aboutir ?
Il s’agit là d’un sujet sensible et important. Comme l’ont souhaité les deux ministres de l’intérieur successifs, nous travaillons sans tabou sur les modalités techniques et juridiques, qui sont très complexes, pour obtenir l’ouverture d’un accès direct à certains fichiers – le fichier des véhicules volés, le fichier national des immatriculations et éventuellement le fichier national des permis de conduire – pour l’obtention des informations dont les policiers municipaux ont à connaître dans le cadre de l’exercice de leurs missions. Je laisserai le soin au ministre de l’Intérieur de faire les annonces lorsque les décisions seront VALIDÉES.
En outre, ces dispositions offriront aux policiers municipaux les moyens de PARTICIPER activement et plus efficacement, aux côtés des forces de l’ordre, au plan de lutte contre les vols de véhicules.
Répondant à une autre demande professionnelle, le ministre de l’Intérieur a lancé en 2013 quatre expérimentations de « partage des fréquences » radios entre les polices municipales et les forces de sécurité de l’Etat. Où en est-on ?
Cette expérimentation de I’interopérabilité des réseaux radio a démarré en septembre 2013 sur quatre sites distincts : Nancy et Evry en zone police, Libourne et Annecy-le-Vieux en zone de gendarmerie. Cette expérimentation s’inscrit dans le cadre des coopérations de sécurité à développer entre les différentes forces. Elle a prioritairement pour objet de fluidifier la circulation de l’information, plus particulièrement dans l’hypothèse d’un danger immédiat, tel que ce fut le CAS lors du drame de Villiers-sur-Marne, le 20 mai 2010.
L’expérimentation est différenciée : prêt de postes Acropol à Nancy et à Evry avec ouverture d’une conférence dédiée, INTÉGRATION au réseau rubis de 20 postes radio Motorola détenus par la PM de Libourne au moyen d’une valise d’interopérabilité, prêt de postes portatifs rubis à Annecy-le-Vieux (la PM a abandonné son réseau analogique pour une utilisation complète des postes gendarmerie).
Quel bilan dressez-vous de cette expérimentation ? Sera-t-elle généralisée ?
Globalement, les premiers résultats de cette expérimentation se révèlent très positifs. Elle est très bien accueillie par le personnel SUR LE terrain, d’autant qu’elle génère un sentiment de plus grande sécurité dans l’accomplissement des missions de police municipale. Et me référant aux évènements de Villiers-sur-Marne ou de Vénissieux, c’est une première satisfaction.
Les enseignements définitifs de l’expérimentation seront tirés début 2015 et je ferai alors, en lien avec le directeur général de la police nationale et le directeur général de la gendarmerie nationale, une proposition au ministre. En outre, je crois savoir que la police municipale de Libourne fera un retour d’expérience à l’occasion du débat SUR LESpolices municipales organisé par le Club prévention sécurité de la Gazette à Toulouse le 2 décembre prochain.
Les gouvernements successifs ne cessent d’encourager le développement des polices intercommunales. Mais celles-ci peinent aujourd’hui à décoller. Comment améliorer le développement de ces polices intercommunales ?
Le développement des polices intercommunales figurent dans la proposition de loi. Lorsque je suis en contact avec les élus, je tente de les convaincre du bien-fondé de cette ORGANISATION. La mutualisation intercommunale permettrait de mieux adapter l’action des policiers municipaux aux variations, dans l’espace et dans le temps, des besoins de présence, ainsi qu’aux évolutions territoriales de la malveillance.
L’intercommunalité peut offrir également une plus grande souplesse dans l’emploi des effectifs, qui pourraient, par exemple, être mobilisés pour la gestion d’évènements sportifs, culturels concernant telle COMMUNE ou telle autre. La mutualisation profite aussi aux petites communes qui, autrement, n’auraient pas les moyens de se doter d’une police municipale. Les maires peuvent trouver là les moyens de réaliser des économies d’échelle et de structure.
La mutualisation intercommunale est également l’une des nombreuses propositions du rapport sur la lutte contre l’insécurité du député Jean-Pierre Blazy, présenté en octobre dernier, qui concernent également les conventions de coordination ou encore la formation (dont la création d’une fiche métiers pour les coordonnateurs de CLSPD, les opérateurs de vidéoprotection…). Comment avez-vous réagi à ces propositions ?
Nous allons étudier la faisabilité juridique et TECHNIQUE des propositions de la commission Blazy qui concernent les polices municipales. Certaines propositions sont déjà dans la proposition de loi. Il convient en outre de regarder s’il n’est pas possible, pour aller plus vite, de prendre des DISPOSITIONS d’ordre réglementaire.
S’agissant du développement de la vidéo-protection, votre prédécesseur, Jean-Louis Blanchou, estimait en 2012 que l’effort de développement était « derrière nous ». Partagez-vous ce constat ?
Concernant les activités de surveillance, on observe une demande sans cesse renouvelée de la part des entreprises et des COLLECTIVITÉS locales en matière de vidéo-protection, qui représente une aide précieuse à la prévention de la délinquance ainsi qu’à l’élucidation des délits, et qui est maintenant globalement acceptée dans notre société comme un outil au service de la sécurité commune.
En 2014, 385 projets ont été envoyés par les COLLECTIVITÉS et ont été traités par notre Délégation.
Quelle place occupe aujourd’hui la vidéo-protection dans les crédits du FIPD ?
Lors de son discours à l’occasion du colloque sur la prévention de la délinquance, le 13 octobre à Paris, le ministre de l’Intérieur est revenu sur l’optimisation de l’utilisation du FIPD. Il a signalé QUE SON montant serait préservé pour 2015, à hauteur de 53 millions d’euros.
CONCERNANT la vidéo-protection, alors qu’elle représentait 60% de l’utilisation des fonds du FIPD dans le cadre du plan 2010-2012, Bernard Cazeneuve a indiqué que sa part serait amenée à « un tiers de I’emploi de ce FONDS dans le cadre de notre nouvelle stratégie » de prévention de la délinquance, la priorité étant désormais accordée « à la prévention de la délinquance des jeunes et de la récidive, qui a vocation à concentrer près de la moitié du FIPD ».
Les crédits « vidéo-protection » seront-ils suffisants ?
L’effort de l’Etat au service du développement de la vidéo-protection se poursuivra, mais « l’effet d’amorce » (des COMMUNES s’intéressant massivement en même temps au dispositif) des débuts du FIPD est maintenant derrière nous. Un rééquilibrage était donc nécessaire.
Une étude d’évaluation de la vidéo-protection a été lancée l’année dernière. Où en est-on ?
Une mission d’évaluation a effectivement été lancée concernant la méthodologie d’utilisation du matériel de vidéo-protection. Elle est EN COURS de travail et elle rendra ses travaux au premier semestre 2015.
Le précédent gouvernement a lancé une vaste réforme de la sécurité privée, dont l’économie est croissante. Le ministre de l’Intérieur a annoncé que cette réforme ne passerait pas par un projet de loi, comme cela avait été initialement prévu. Faut-il y voire une réforme au rabais ?
Le travail fourni en amont par Jean-Louis Blanchou et les partenaires sociaux n’est absolument pas perdu. Les CONSULTATIONS qui ont été menées ont fait avancer le débat. Cependant, le projet d’une loi fondatrice n’est plus d’actualité, tout d’abord à cause DE l’encombrement du calendrier parlementaire, et surtout car de nombreux points de réforme concernant la professionnalisation et la moralisation relèvent plutôt du domaine réglementaire, voire de la signature de conventions.
La PRINCIPALE priorité est ainsi d’identifier un certain nombre de sujets qui pourront faire l’objet de réformes rapides, simples, pragmatiques, à même de donner plus de liberté à la profession et de régler des points d’insécurité réglementaire, afin de répondre au plus près aux attentes des acteurs de la sécurité privée. Ce travail sera ensuite soumis au ministre, qui tranchera et rendra ses arbitrages publics notamment lors des Assises de la Sécurité privée 2014 qui ont lieu le 8 décembre.
Vous présidez le groupe de travail sur la sécurité de l’Euro 2016 de football. Qu’en ressort-il ?
L’Euro 2016 sera une bonne OCCASION de coopération à grande échelle entre les différentes forces qui concourent à la sécurité en France.
Nous sommes aujourd’hui sur un travail d’anticipation de la montée en puissance du vivier qui pourrait permettre aux professionnels de la sécurité privée de faire face aux besoins énormes qui se manifesteront. Nous réfléchissons notamment au recours éventuel à la réserve de gendarmes de deuxième niveau, qui regroupe environ 30 000 PERSONNES. Ce sont les ex-militaires de la gendarmerie qui n’ont plus de liens avec le service actif mais qui sont susceptibles de se porter volontaires à titre personnel et privé pour une mission de sécurité temporaire au profit d’une entreprise.

 

source : http://www.lagazettedescommunes.com/294986/securite-locale-entretien-avec-thierry-coudert-sur-les-grands-chantiers-de-linterieur/

 

A propos de l'Auteur