Docteur en droit – Commissaire divisionnaire honoraire – Ancien secrétaire général du syndicat des commissaires de police

Ce début de semaine, à Marseille, a commencé en toute discrétion l’épineux procès de « la fusillade de la Castellane ». Survenue en février 2015 au cœur d’un quartier connu pour être une plaque tournante du trafic de stupéfiants, cet épisode lié au grand banditisme était intervenu quelques heures à peine avant la visite de Manuel Valls, alors Premier ministre.

Deux faits notables avaient marqué ce déchaînement de violence.

Le premier, parce que ces événements tombaient à un moment où le gouvernement de François Hollande espérait tirer parti de résultats soi-disant encourageants dans ce département, en matière de baisse de la délinquance.

Le second, parce que l’on voyait l’intervention, sur le sol français, de mercenaires kosovars recrutés par l’un des leurs, résidant à Marseille. Ce dernier avait donné pour mission à ces tueurs de reconquérir, par les armes, ce point de vente de drogue qui lui échappait. Il faut dire que, pour ces trafiquants, les enjeux financiers étaient importants. En effet, estimés à 80.000 euros par jours, les profits liés au trafic de drogue dans les quartiers nord de Marseille voient des bandes rivales s’affronter régulièrement à coups d’armes automatiques, et contribuent à l’hécatombe en vies humaines que l’on observe ces dernières années.

Les nombreux règlements de comptes qui sont intervenus récemment au sein de la cité phocéenne sont devenus, au fil du temps, emblématiques de la dérive sécuritaire qui touche nos banlieues. Ils signent les échecs répétés des politiques publiques mises en place à coup de millions d’euros, et qui n’ont eu d’autre effet que de repousser un fléau qui dégénère aujourd’hui en quasi-guerre civile.

Par ailleurs, la survenance d’un événement de cette gravité, qui avait fort heureusement pu être contenu grâce à l’intervention des forces de l’ordre, met en lumière la politique de communication des derniers gouvernements, manifestement plus à l’aise pour commenter des chiffres de la délinquance sortis comme par magie d’un chapeau que de traiter les problèmes de sécurité.

Inutile de souligner qu’à cette heure, rien n’est résolu, que les quartiers nord de Marseille restent aux mains des dealers et que la sécurité dans notre pays n’en finit pas de se dégrader. Mais soyons rassurés, il y a bien dans les cartons d’Emmanuel Macron et de Gérard Collomb, concocté par quelques énarques parisiens, un plan pour en finir avec la délinquance… au moins sur le papier !

Le second enseignement de cette fusillade de la Castellane est la participation de « mercenaires » kosovars. Cette république, proclamée indépendante en 2008 grâce aux soutiens des États-Unis et de l’Europe, n’a pas grand-chose pour elle. Elle dispose cependant d’une pègre solidement implantée, et il se dit, selon un rapport parlementaire du Conseil de l’Europe, que le président de ce nouvel État, Hashim Thaçi, aurait été, dans les années 1990-2000, à la tête d’un groupe criminel « spécialisé » dans le trafic d’organes.

Bien entendu, pour les autorités du Kosovo, il ne s’agit que d’un rapport « infondé et diffamatoire ». Quoi qu’il en soit, tout bon policier sait que la mafia kosovare n’a plus rien à prouver. Impliquée dans les trafics de stupéfiants, d’armes et d’êtres humains, elle se distingue, y compris sur notre sol, par une violence inouïe. Aussi l’usage de la kalachnikov dans les quartiers nord de Marseille n’avait finalement rien de très étonnant.

Reste à savoir ce que donnera ce procès au cours duquel les peines encourues par les protagonistes de cette fusillade vont de dix à vingt ans d’emprisonnement. Notre Justice, à défaut de nos politiques, saura-t-elle mettre un coup d’arrêt à cette folie meurtrière ? Réponse le 4 avril…