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Depuis la prison, « l’Artiste » lui demande d’y lancer des paquets

Lundi, deux personnes ont été interpellées devant la maison d’arrêt de Villefranche, dans le cadre d’une affaire de lancers de colis. L’un d’entre eux comparaissait au tribunal correctionnel, mercredi, pour complicité.

 

Les lancers de paquets de l’extérieur, par-dessus la clôture, vers l’intérieur de la maison d’arrêt, constituent un véritable fléau.  Photo d’archives Richard MOUILLAUDLes lancers de paquets de l’extérieur, par-dessus la clôture, vers l’intérieur de la maison d’arrêt, constituent un véritable fléau. Photo d’archives Richard MOUILLAUD

Polo noir à manches longues près du corps, barbe brune de trois jours, propre sur lui, le prévenu apparaît dans le box, encadré de deux policiers. Ce jeune homme de 20 ans est présenté devant les juges en comparution immédiate, mercredi, pour complicité de remise de paquets.

Deux jours plus tôt, il a été interpellé en compagnie d’un mineur par la police municipale de Villefranche, pour avoir lancé six colis dans la cour de la maison d’arrêt. La témoin de la scène, une gendarme, de passage dans le cadre de sa vie privée, assure avoir vu les deux comparses jeter les colis. Impossible, selon l’avocate du prévenu : « Depuis un accident de boxe au niveau de l’épaule, il lui est impossible d’effectuer ce mouvement de rotation, encore moins avec du poids dans la main. » Le prévenu soutient ainsi que seul le mineur a lancé les paquets.

Six colis lancés, pas un retrouvé

« Sur votre rôle, ce qui est certain, c’est que vous êtes le conducteur et que vous êtes à côté du mineur lors de l’infraction », affirme le président, ce que reconnaît le jeune homme. Il ajoute : « Sur votre téléphone, on a pu trouver de nombreux appels de la part d’un de vos contacts, désigné comme “l’Artiste”. » Un nom romanesque qui désigne « une personne du quartier » du prévenu, incarcéré aujourd’hui à la maison d’arrêt de Villefranche. Par « peur des représailles », le jeune homme refuse de donner l’identité qui se cache derrière l’Artiste.

« La vie au sein de la maison d’arrêt est déjà difficile, mais elle est encore compliquée par ces lancers de paquets, s’insurge la procureure. Ils encouragent le trafic et provoquent des tensions, des violences supplémentaires dans l’établissement. » D’autant qu’on ne connaît pas exactement le contenu des six colis, non retrouvés. En garde à vue, le duo parlait de viande et de cannabis, d’une bouteille également. Mais, selon l’avocate du prévenu, ce ne sont que des suppositions, puisque les paquets auraient été déjà emballés et déposés dans la voiture lorsqu’ils y sont montés.

Les deux comparses seraient partis de l’agglomération lyonnaise en voiture pour délivrer les six colis, à la demande de l’Artiste justement. Une action qui devait être rémunérée 50 euros chacun, par « un ami de l’Artiste », précise le prévenu. « Avec les frais de péage et d’essence, il ne reste pas grand-chose », avance l’avocate, pour justifier la thèse d’un acte sous la contrainte.

Le prévenu aurait ainsi refusé à plusieurs reprises de lancer ces paquets. « Il accepte quand l’Artiste lui dit qu’il n’aura qu’à conduire, continue l’avocate. C’était une façon pour lui d’acheter sa liberté, que cette personne le laisse enfin tranquille. » La procureure n’est pas convaincue : « Plus que la pression, c’est par amitié qu’il a sans doute agi. »

« S’extraire de son quartier »

Le président s’étonne de trouver deux adresses différentes, à Lyon et à Villeurbanne (Rhône), pour le domicile du prévenu. « Je suis sans domicile fixe, je dors un peu partout », explique le jeune homme. Il se justifie : « C’est mon choix, j’ai décidé de quitter le domicile de mes parents. »

Depuis qu’il a terminé son contrat de transporteur en mars dernier, le prévenu est sans emploi et « rentre tard le soir ». Il vit par intermittence chez son oncle et passe, de temps en temps, dans un foyer pour jeunes sans domicile fixe. L’avocate préconise au jeune homme de s’installer réellement dans ce foyer spécialisé, ce qui lui permettrait de « s’extraire de son quartier ».

Inconnu des services de police, sans casier judiciaire, le jeune homme est décrit par son père comme « quelqu’un sans difficultés, qui cherche du travail », rapporte le président. La procureure requiert trois mois d’emprisonnement. Une peine transformée en sursis par les juges, estimant un « incident de parcours ».

Lola Bondu

Source:: Depuis la prison, « l’Artiste » lui demande d’y lancer des paquets

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