Juriste

Si rien n’arrête le flot destructeur, dans quelques années, en dehors des lieux sanctuarisés, les chrétiens auront disparu.

Voici un mois, le réalisateur du documentaire intitulé La persécution des chrétiens aujourd’hui dans le monde, Raphaël Delpard, expliquait sur ce même site qu’il avait choisi ce sujet à la fin des années 1990, ayant été « littéralement stupéfait d’apprendre qu’au XXe siècle, des hommes, des femmes et des enfants puissent être persécutés en raison de leur foi » et « frappé par l’extraordinaire ferveur de ces gens ».

Bien que confidentiellement diffusé au cinéma parisien Le Lucernaire, j’invite tous les lecteurs de Boulevard Voltaire à se précipiter dans cette salle pour découvrir ce remarquable film, si toutefois sa projection se poursuit dans les semaines à venir.

Dans une première partie consacrée aux reportages sur le terrain, le film dresse un constat accablant des persécutions subies par plus de 215 millions de chrétiens de toutes obédiences dans une cinquantaine de pays à travers la planète, à savoir les derniers États communistes poursuivant les méthodes totalitaires de l’époque soviétique et la majorité des pays musulmans rejetant toute forme de liberté de conscience.

Emprisonnements dans des camps de concentration accompagnés de tortures physiques, de séances d’autocritique et de délations comme au bon vieux temps du « petit père des peuples » en Corée du Nord ou au Vietnam ; assassinats, lapidations, viols des femmes, enlèvements de jeunes filles converties et mariées de force à des musulmans en terre d’islam, particulièrement dans la péninsule Arabique, au Pakistan et en Afrique subsaharienne.

Mais le plus intéressant, selon moi, réside dans la seconde partie du reportage consacrée aux interventions des responsables d’associations de défense des chrétiens dans le monde, telle l’Aide à l’Église en détresse (AED) ou SOS Chrétiens d’Orient, ainsi qu’à l’analyse de diplomates, universitaires et autres spécialistes de la question comme Annie Laurent ou Alexandre del Valle.

Il en ressort que les organisations internationales chargées de la défense des droits de l’homme, qu’il s’agisse de la Commission ad hoc auprès de l’ONU ou des institutions de l’Union européenne, habituellement promptes à réagir dès qu’une minorité ethnique, culturelle ou religieuse est victime d’oppression, gardent un silence coupable sur la persécution des disciples du Christ, les abandonnant lâchement dès que le représentant d’un État couvrant ou ordonnant les exactions dénoncées formule une objection.

Une des personnes interrogées a rappelé que le gouvernement français, quel que soit le parti au pouvoir, s’est toujours refusé à intervenir pour défendre ou secourir les populations persécutées en raison de leur foi chrétienne, au nom d’une conception étroite et sectaire de la laïcité et du « principe de non-discrimination ». Pour les mêmes raisons, nos dirigeants n’ont jamais accepté d’accorder en priorité le statut de réfugié aux immigrés coptes, syriaques ou chaldéens fuyant le Proche-Orient.

Pour conclure, laissons de nouveau la parole à Raphaël Delpard, qui entend lancer « un cri d’alerte, un cri d’épouvante, en face de l’ethnocide qui se déroule à un jet de pierre de notre conscience, dans l’épais silence des institutions censées protéger les individus » et nous « invite à prendre la mesure du drame, car si rien n’arrête le flot destructeur, dans quelques années, en dehors des lieux sanctuarisés, les chrétiens auront disparu. Pourrez-vous alors dire que vous ne le saviez pas ? »