Médecin

La première chose qu’apprennent les étudiants en médecine, c’est que l’examen du malade doit toujours être complet. Parce que la clé du diagnostic d’une pseudo-migraine peut être un signe discret au niveau d’un membre inférieur. C’est pourquoi, contrairement au Dr House qui ne s’approche jamais à moins de deux mètres du patient, les externes français peuvent passer deux heures au lit d’un hospitalisé entrant. Certes, avec la pratique et la spécialisation, le rituel s’allège, mais son principe reste dans le subconscient des médecins. Ainsi, même les plus expérimentés répugnent à faire des diagnostics par téléphone. D’autant que l’expression des malades peut prêter à confusion. Certains, par crainte de paraître pusillanimes, minimisent leur souffrance ; d’autres, au contraire, l’amplifient dans l’espoir d’être pris « plus au sérieux » ; sans parler des cultures où on répond oui à toutes les questions « par respect pour le médecin »…

Ce long préambule pour éclairer la grande complexité de la profession des permanenciers auxiliaires de régulation médicale (PARM) qui, après avoir localisé avec soin chacun des 30 millions d’appels annuels, doivent en quelques minutes différencier l’urgence vraie de celle ressentie, analyser la détresse et évaluer la gravité par un interrogatoire bref mais précis, avant de le transmettre le cas échéant au médecin régulateur.

Bien sûr, la brutalité désinvolte des réponses de la PARM impliquée dans l’affaire Naomi Musenga – qui défraye actuellement la chronique – est très choquante. Mais nous n’avons qu’un morceau choisi de l’enregistrement, et à ce stade, rien ne dit qu’une réponse plus adaptée aurait sauvé cette mère de 22 ans, même si cela n’excuse en rien l’attitude de l’opératrice.

Il semble également que, tant pour l’autopsie que pour l’accès au dossier, l’hôpital de Strasbourg n’ait pas été un modèle de diligence et de transparence. Il n’y a pas que l’armée que l’on puisse qualifier de grande muette ! De là à ce que de courageux anonymes (exerçant certainement des métiers à hautes responsabilités) aient tout compris et s’autorisent à se répandre en injures et en menaces téléphoniques et électroniques contre l’hôpital du Bas-Rhin…

La lampiste désignée sera-t-elle seule à porter le poids de ce douloureux échec ? C’est ce que les trois enquêtes diligentées vont maintenant tenter de déterminer.